This blog page is meant to trigger off discussions on issues related to project ZACA (an urban renewal project implemented in Ouagadougou, Burkina Faso). I welcome your comments and views in French or English about the implementation of the project, its socio-economic impacts on the displaced populations.
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Comment posted by Yaro Zakarya (Administrateur des Services Sociales), July 7,2010
L’Etat a le droit de faire déguerpir des populations pour des causes d’utilité publique. Partant sur cette base, on peut comprendre que l’Etat Burkinabè ait procédé en 2003, au déguerpissement des populations des quartiers centraux ciblés de la ville de Ouagadougou (Zangouenttin, Koulouba, Tiedpalgo, Kamsonghin…), dans le cadre du projet ZACA dont l’objectif serait entre autres, de faire de la zone ZACA un pôle de développement économique de notre pays. Personnellement, nous n’avons rien contre de tel projet car nous supposons qu’il s’inscrit dans le plan d’aménagement de la ville. Ce que nous déplorons, c’est la manière dont le projet a été mis en œuvre.
Tout d’abord, il s’est agit d’un projet sans mesures d’accompagnement à priori, sauf si l’on doit considérer les compensations financières comme mesures d’accompagnement. En son temps les populations disaient n’avoir pas été préparées au déplacement. Nous sommes citoyens de la ville de Ouagadougou et jamais nous n’avons senti une volonté réelle des autorités à sensibiliser les populations pour les amener à adhérer au projet. Les rumeurs du déguerpissement circulaient, et nous avons dû l’apprendre au même moment que la majorité des populations concernées. Aussi, avons nous suivi les tractations qui ont animé les relations entre les mouvements de lutte et les responsables du projet.
Les habitants les plus avisées qui ont vendu leur domaine avant la circulation des rumeurs du déguerpissement, ont pu obtenir des sommes colossales avec lesquelles ils ont dû investir et assurer de lendemains meilleurs. Mais la majorité qui ne croyaient ni à l’aboutissement du projet ni au déguerpissement a été contrainte par le pouvoir public, à quitter la zone ZACA. Force reste à l’autorité publique.
Grâce aux frais de dédommagement ajoutés à leurs économies ou soutiens des autres, certains déplacés ont pu s’acquérir des parcelles à la trame d’accueil de Ouaga 2000 où ils achèvent progressivement leur construction et peuvent s’enorgueillir aujourd’hui, de partager la même aire géographique avec la haute bourgeoisie (nouveau palais présidentiel ; résidences des nouveaux riches composés essentiellement de hauts fonctionnaires, d’entrepreneurs, de commerçants et hommes d’affaires ; Hôtels à quatre étoiles ; bâtiments administratifs ou diplomatiques de haut standing et autres bâtiments futuristes).
Mais en réalité, Ouaga 2000 ou ses environnants telle que la trame d’accueil, était –il initialement destiné aux populations déplacées ? Nous n’en savons rien. Tout ce que nous savons c’est que sept (07) ans après leur réinstallation sur la trame d’accueil de Ouaga 2000, les déplacés sont éloignées du centre ville et ne disposent pas d’infrastructures de base telles que le marché qui constitue leur domaine de prédilection et leur principale source de revenu.
Pire encore, toute tentative de mener une activité lucrative (telle que l’ouverture de dépôt commercial aux abords des voies) sur la trame d’accueil de Ouaga 2000, aurait été maintes fois empêchée par les autorités municipales. Si cela est vrai, on pourrait reprocher à ces autorités de n’avoir pas facilité la tâche de reconstruction des déguerpis. En rappel, les déguerpis étaient constitués essentiellement de travailleurs du secteur informel qui exerçaient au grand marché de Ouaga et qui ont toujours envie de continuer leur commerce ou du reste de se reconvertir professionnellement sur la trame d’accueil de Ouaga 2000. Mais visiblement depuis leur arrivée sur les lieux, les circonstances ne leur offrent aucune issue d’épanouissement socio-économique.
Par conséquent, beaucoup de déplacés sont actuellement appauvris, déboussolés et ne savent pas comment assurer la scolarité des enfants, la santé et l’alimentation de la famille … Aujourd’hui, la joie de certains déplacés, c’est d’avoir tout simplement quitté un quartier, une zone où les six mètres étaient restreints et insalubres et où le déluge du 1er Septembre allait ravager les maisons délabrées et créer de nombreux sinistrés. Et qu’allait devenir leur sort si le déluge les trouvait toujours dans les bas-fonds de Zangouenttin, Koulouba, Tiedpalgo, Kamsonghin? Ils seraient peut-être logés à la même enseigne que les sinistrés du 1er Septembre 2009, c’est- à -dire sur la trame d’accueil de Yagma… où les conditions d’installation et de vie ne sont guère mieux que celle de la trame d’accueil de Ouaga 2000.
Et que sait-on si précisément, Zangouenttin et Tiedpalgo n’allaient pas être considérés comme des zones submersibles, inondables suite à cette catastrophe du 1er septembre 2009 ? Comme par hasard, nos autorités ont été visionnaires avec le projet ZACA. Ce projet a pu prévenir une catastrophe et réduire considérablement le nombre de sinistrés qu’allait connaître le 1er Septembre 2009. Mais en attendant, se préoccupe-t-on des habitants de la trame d’accueil qui ont du mal à reconstruire leur vie, faute de marché et évidemment d’autres infrastructures de base? Faut-il laisser ces populations parcourir, au moins 11 Km pour atteindre le grand marché, incendié et récemment réhabilité ? Les « débrouillards » de la trame d’accueil, peuvent-ils se réinsérer économiquement dans un marché si éloigné et où les gros commerçants se plaignent déjà de ne plus faire bon marché ? Non, les déplacés méritent d’être mieux traités. Ils ont besoin d’un marché sur la trame d’accueil où ils pourront mieux travailler, refaire leur vie et mieux s’occuper de leur famille. En attendant de construire un marché digne de Ouaga 2000, les populations devraient être autorisées à occuper l’espace dit réserver au marché. « A défaut de la mère, on peut téter la grand-mère ». Si les autorités municipales hésitent encore à se montrer favorables à de telles propositions, pourquoi, ne pas réunir les populations et signer des protocoles d’accords d’occupation du marché avec des conditionnalités clairement définies ?
En voulant développer une ville, il faut éviter de fabriquer des pauvres en série. Car le développement ne réside pas dans l’enrichissement des riches, mais dans la promotion socio-économique des pauvres et le bien-être de l’ensemble des populations. Le projet ZACA dans son ensemble, aurait dû commencer par construire un marché sur la trame d’accueil avant de déguerpir les populations. A défaut, la réalisation du marché devrait immédiatement suivre l’installation des déplacés. Les études d’impact du projet (s’il y a lieu) ont–elles envisagé de telles perspectives ? Si non, il faut y penser. C’est en se préoccupant réellement de l’avenir des déplacés qu’on peut saluer tout projet de déguerpissement pour des causes d’utilité publique. Sans ces précautions, on tentera de verser les efforts de développement dans un sac toujours percé par le bas.
Yaro Zakarya
Comment posted by Yaro Zakarya (Administrateur des Services Sociales), July 7,2010
L’Etat a le droit de faire déguerpir des populations pour des causes d’utilité publique. Partant sur cette base, on peut comprendre que l’Etat Burkinabè ait procédé en 2003, au déguerpissement des populations des quartiers centraux ciblés de la ville de Ouagadougou (Zangouenttin, Koulouba, Tiedpalgo, Kamsonghin…), dans le cadre du projet ZACA dont l’objectif serait entre autres, de faire de la zone ZACA un pôle de développement économique de notre pays. Personnellement, nous n’avons rien contre de tel projet car nous supposons qu’il s’inscrit dans le plan d’aménagement de la ville. Ce que nous déplorons, c’est la manière dont le projet a été mis en œuvre.
Tout d’abord, il s’est agit d’un projet sans mesures d’accompagnement à priori, sauf si l’on doit considérer les compensations financières comme mesures d’accompagnement. En son temps les populations disaient n’avoir pas été préparées au déplacement. Nous sommes citoyens de la ville de Ouagadougou et jamais nous n’avons senti une volonté réelle des autorités à sensibiliser les populations pour les amener à adhérer au projet. Les rumeurs du déguerpissement circulaient, et nous avons dû l’apprendre au même moment que la majorité des populations concernées. Aussi, avons nous suivi les tractations qui ont animé les relations entre les mouvements de lutte et les responsables du projet.
Les habitants les plus avisées qui ont vendu leur domaine avant la circulation des rumeurs du déguerpissement, ont pu obtenir des sommes colossales avec lesquelles ils ont dû investir et assurer de lendemains meilleurs. Mais la majorité qui ne croyaient ni à l’aboutissement du projet ni au déguerpissement a été contrainte par le pouvoir public, à quitter la zone ZACA. Force reste à l’autorité publique.
Grâce aux frais de dédommagement ajoutés à leurs économies ou soutiens des autres, certains déplacés ont pu s’acquérir des parcelles à la trame d’accueil de Ouaga 2000 où ils achèvent progressivement leur construction et peuvent s’enorgueillir aujourd’hui, de partager la même aire géographique avec la haute bourgeoisie (nouveau palais présidentiel ; résidences des nouveaux riches composés essentiellement de hauts fonctionnaires, d’entrepreneurs, de commerçants et hommes d’affaires ; Hôtels à quatre étoiles ; bâtiments administratifs ou diplomatiques de haut standing et autres bâtiments futuristes).
Mais en réalité, Ouaga 2000 ou ses environnants telle que la trame d’accueil, était –il initialement destiné aux populations déplacées ? Nous n’en savons rien. Tout ce que nous savons c’est que sept (07) ans après leur réinstallation sur la trame d’accueil de Ouaga 2000, les déplacés sont éloignées du centre ville et ne disposent pas d’infrastructures de base telles que le marché qui constitue leur domaine de prédilection et leur principale source de revenu.
Pire encore, toute tentative de mener une activité lucrative (telle que l’ouverture de dépôt commercial aux abords des voies) sur la trame d’accueil de Ouaga 2000, aurait été maintes fois empêchée par les autorités municipales. Si cela est vrai, on pourrait reprocher à ces autorités de n’avoir pas facilité la tâche de reconstruction des déguerpis. En rappel, les déguerpis étaient constitués essentiellement de travailleurs du secteur informel qui exerçaient au grand marché de Ouaga et qui ont toujours envie de continuer leur commerce ou du reste de se reconvertir professionnellement sur la trame d’accueil de Ouaga 2000. Mais visiblement depuis leur arrivée sur les lieux, les circonstances ne leur offrent aucune issue d’épanouissement socio-économique.
Par conséquent, beaucoup de déplacés sont actuellement appauvris, déboussolés et ne savent pas comment assurer la scolarité des enfants, la santé et l’alimentation de la famille … Aujourd’hui, la joie de certains déplacés, c’est d’avoir tout simplement quitté un quartier, une zone où les six mètres étaient restreints et insalubres et où le déluge du 1er Septembre allait ravager les maisons délabrées et créer de nombreux sinistrés. Et qu’allait devenir leur sort si le déluge les trouvait toujours dans les bas-fonds de Zangouenttin, Koulouba, Tiedpalgo, Kamsonghin? Ils seraient peut-être logés à la même enseigne que les sinistrés du 1er Septembre 2009, c’est- à -dire sur la trame d’accueil de Yagma… où les conditions d’installation et de vie ne sont guère mieux que celle de la trame d’accueil de Ouaga 2000.
Et que sait-on si précisément, Zangouenttin et Tiedpalgo n’allaient pas être considérés comme des zones submersibles, inondables suite à cette catastrophe du 1er septembre 2009 ? Comme par hasard, nos autorités ont été visionnaires avec le projet ZACA. Ce projet a pu prévenir une catastrophe et réduire considérablement le nombre de sinistrés qu’allait connaître le 1er Septembre 2009. Mais en attendant, se préoccupe-t-on des habitants de la trame d’accueil qui ont du mal à reconstruire leur vie, faute de marché et évidemment d’autres infrastructures de base? Faut-il laisser ces populations parcourir, au moins 11 Km pour atteindre le grand marché, incendié et récemment réhabilité ? Les « débrouillards » de la trame d’accueil, peuvent-ils se réinsérer économiquement dans un marché si éloigné et où les gros commerçants se plaignent déjà de ne plus faire bon marché ? Non, les déplacés méritent d’être mieux traités. Ils ont besoin d’un marché sur la trame d’accueil où ils pourront mieux travailler, refaire leur vie et mieux s’occuper de leur famille. En attendant de construire un marché digne de Ouaga 2000, les populations devraient être autorisées à occuper l’espace dit réserver au marché. « A défaut de la mère, on peut téter la grand-mère ». Si les autorités municipales hésitent encore à se montrer favorables à de telles propositions, pourquoi, ne pas réunir les populations et signer des protocoles d’accords d’occupation du marché avec des conditionnalités clairement définies ?
En voulant développer une ville, il faut éviter de fabriquer des pauvres en série. Car le développement ne réside pas dans l’enrichissement des riches, mais dans la promotion socio-économique des pauvres et le bien-être de l’ensemble des populations. Le projet ZACA dans son ensemble, aurait dû commencer par construire un marché sur la trame d’accueil avant de déguerpir les populations. A défaut, la réalisation du marché devrait immédiatement suivre l’installation des déplacés. Les études d’impact du projet (s’il y a lieu) ont–elles envisagé de telles perspectives ? Si non, il faut y penser. C’est en se préoccupant réellement de l’avenir des déplacés qu’on peut saluer tout projet de déguerpissement pour des causes d’utilité publique. Sans ces précautions, on tentera de verser les efforts de développement dans un sac toujours percé par le bas.
Yaro Zakarya